Au Québec, on estime que seulement 2 détenteurs d’un doctorat sur 10 poursuivront un parcours purement académique. Autrefois restreints aux universités et à quelques entreprises ou institutions, les chercheurs sont maintenant en demande même dans des PME, mais la transition n’est pas toujours simple. Au-delà du monde académique et industriel, il existe une troisième voie : les Centres d’innovation industrielle, également connus par l’acronyme anglais RTO.
Souvent décrits comme le point de rencontre de ces deux univers, ce sont des organisations sans but lucratif dont la mission principale est de produire, de combiner et de rapprocher divers types de connaissances, de compétences et d’infrastructures afin de mener à bien une série d’activités de recherche et développement en collaboration avec des partenaires publics et industriels. Ces centres offrent un terreau très fertile pour semer et faire fleurir la relève en recherche québécoise. Dans ce scénario, le Centre de recherche informatique de Montréal (CRIM) se démarque par ses activités dans les domaines des sciences des données, de l’intelligence artificielle et de l’architecture logicielle.
Compte tenue l’avancement fulgurant de l’intelligence artificielle dans les dix dernières années et de la synergie entre la recherche académique et les outils technologiques d’envergure de l’industrie, on a vu émerger une énorme gamme d’applications nouvelles et dans plusieurs domaines qui, à leur tour, ont stimulé des nouvelles recherches et de nouveaux outils. Ce momentum ne semble pas se calmer, au contraire, il prend encore plus d’élan pour arriver à une dimension toujours inestimable, ce qui met en avant le rôle des chercheurs dans l’industrie. Et si la pénurie de main-d’oeuvre touche presque tous les secteurs, le monde de la recherche n’a pas été épargné. Cette valorisation se traduit par d’excellentes conditions d’emploi et des opportunités de poursuivre leurs études de doctorat ou post-doctorat. Pour cela, les étudiants de 2e et 3e cycles doivent prendre en considération la réalité de l’industrie et d’aligner leurs recherches aux besoins pratiques des entreprises.
« Au CRIM, les chercheurs sont plongés dès le départ dans les équipes de réalisation où ils collaborent étroitement avec les ingénieurs, les scientifiques des données et les experts de domaine. Ils sont intégrés dans les cycles des projets avec les clients et partenaires, où ils sont confrontés aux réalités concrètes de l’industrie : les contraintes de calendrier, de budget, de ressource. Ils doivent composer avec des données insuffisantes, des problèmes flous ou mal cernés, gérer le contrôle de qualité, l’évaluation du risque. » affirme Houman Zolfaghari, Directeur, Apprentissage automatique appliquée au CRIM.
La diversité de projets et de domaines d’action attire aussi des chercheurs vers les centres de recherche industriel. « La collaboration avec des équipes multidisciplinaires sur des sujets variés est très enrichissante. On peut avoir une carrière axée sur la santé, mais échanger tout autant avec des chercheurs qui travaillent sur des projets sur l’environnement, la préservation des langues autochtones ou l’identification des baleines bleues, par exemple », affirme Benjamin Dalmas, chercheur industriel au CRIM, dont le parcours atypique a débuté par un baccalauréat en économie et s’est poursuivi avec une maîtrise en informatique de gestion et finalement un doctorat en informatique.
« Tandis que la recherche académique favorise une approche top-down, c’est-à-dire, une personne qui a beaucoup de savoir sur un sujet spécifique et qui l’explore pour produire encore plus de connaissance, la recherche industrielle est plutôt bottom-up : on part d’un problème terrain pour remonter jusqu’à la solution. Afin d’apporter une réponse à une problématique, nous faisons appel à des savoirs de façon parallèle ou simultanée, comme la vision, l’audio, le texte ou les données géospatiales. Voir le résultat concret de son travail, que ce soit une réussite commerciale ou une amélioration dans un enjeux sociétal, c’est le carburant du chercheur industriel », dit Benjamin.
Situé à Mile-Ex, le quartier de l’IA à Montréal, le CRIM accepte chaque année un certain nombre de stagiaires qui travaillent en étroite collaboration avec l’équipe de recherche et développement sur des projets dans divers domaines passionnants. De plus, des postes permanents et contractuels sont souvent affichés sur le site de l’organisation sur : www.crim.ca/carriere
*Article publié sur Le Devoir le 21 octobre 2022.